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L’hibiscus pourpre ou le récit de la construction d’une jeune adolescente nigériane

Quel plaisir de retrouver la plume de la grande Chimamanda Ngozi Adichie, que nous avions déjà découverte avec l’excellent Americanah.

L’hibiscus pourpre est le tout premier roman de l’autrice, dans lequel elle aborde d’importantes thématiques telles que la famille, la construction personnelle, l’amour mais aussi de la violence.

La violence d’une société patriarcale

Tout au long du roman, on suit l’évolution du personnage principal, Kambili, jeune adolescente.

A travers son regard, on découvre à quel point la société nigériane peut être divisée socialement. Kambili vit dans une famille aisée lorsqu’une extrême majorité de la société est précaire et subit de plein fouet la corruption de l’Etat.

Chimamanda Ngozi Adichie a fait le choix de ne pas ménager son lectorat : elle aborde frontalement la question de la violence intra familiale.

Le père, socialement reconnu et religieux, fait preuve d’une violence sans pareille au sein de son domicile, tant à l’égard de ses enfants que de son épouse.

L’autrice démontre le contraste saisissant entre l’image de modèle qu’il renvoie au sein de la société et la réalité effroyable du foyer.

Par le biais de l’hibiscus pourpre, elle décrit avec brio le mécanisme infernal et complexe de l’emprise. L’héroïne nous montre à quel point il est difficile de se construire tant il apparait impossible de dissocier l’idéalisation de la figure paternelle de l’effroi qu’il nous inspire.

« La peur. Je connaissais bien la peur ; pourtant, quand je l’éprouvais, ce n’était jamais la même que les fois précédentes, comme si elle était disponible en parfums et coloris différents.« 

A la découverte d’une autre monde : le séjour chez sa tante

Kambili et son frère parvienne à convaincre leur père de les laisser séjourner chez leurs tantes durant quelques semaines. Ils ne se doutent pas que c’est leur vie qui va changer.

Les enfants découvrent un tout autre mode de vie, où la liberté et la joie de vivre règnent en maîtres. Leur tante Ifeoma est une femme libre et indépendante, qui assume seule la charge de ses enfants, malgré les difficultés et la corruption du Nigéria.

Elle est l’archétype du féminisme, de la puissance féminine. Ifeoma est le personnage qui sert également de modèle dans la construction de Kambili, tant son charisme et sa force sont inspirants.

Le monde chez leur tante est totalement différent de celui dans lequel ils ont toujours eu l’habitude de vivre. On assiste donc à l’évolution des deux enfants et à leur réaction face à des situations qui seraient absolument interdites chez eux.

Si le frère se saisit quasi immédiatement de la liberté à laquelle il a toujours aspiré, Kambili est plus peureuse, réservée. Elle quitte petit à petit l’innocence dans laquelle elle a toujours été bercée.

Toutefois, l’emprise est tellement forte qu’elle les habite même lorsqu’ils sont éloignés de leur père. L’émancipation, si elle apparaît comme nécessaire, est progressive.

« Cette nuit-là, je rêvai que je riais, mais ça ne ressemblait pas à mon rire, même si je ne savais pas à quoi ressemblait mon rire. C’était un rire saccadé, rauque et enthousiaste, comme celui de tatie Ifeoma. »

L’hibiscus pourpre est le roman qui permet de mettre en exergue les différences culturelles et sociales au sein d’une même famille, vivant pourtant dans le même Etat.

Un roman fort et engagé

Une fois de plus, Chimamanda Ngozi Adichie nous livre une oeuvre engagée, dénonçant les violences patriarcales présentes dans toutes les cultures.

Le roman a également une portée politique, puisqu’il est question de corruption qui est omniprésente et des difficultés économiques et sociales auxquelles fait face le Nigéria.

Toutefois, l’autrice a veillé à présenter la culture et les traditions de ce pays afin de ne pas uniquement en dresser un portrait négatif.

Le talent de l’autrice pour conter les histoires est indéniable, d’autant plus qu’elles mêlent l’intime et le politique.

Si l’hibiscus pourpre est l’histoire Kambili et de sa construction en tant que jeune femme, c’est également un roman qui aborde des thématiques universelles.

C’est ce qui fait la force de l’oeuvre d’Adichie : elle écrit sur son histoire, sa culture et cela a des retentissements à une bien plus grande échelle.

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